Sensible à la cause environnementale, Aude LARUELLE a voulu se mettre en action en alliant ses aspirations professionnelles à ses valeurs. Entre recyclerie et vêtements sur-mesure, elle prouve avec La Griffe du Jag que la mode peut se consommer avec raison. Rencontre…
Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Aude LARUELLE
Je suis Aude LARUELLE, j’ai 39 ans et une formation initiale d’analyste dans la finance. Ma réorientation professionnelle s’est faite en 2017 avec la création de Jag. Depuis toujours, la mode et le dessin font partie de moi et je savais que je finirais tôt ou tard par me mettre à mon compte. Il y a 11 ans, je suis devenue maman pour la première fois, ce qui a amené de nouvelles problématiques. Trouver des vêtements et surtout de la lingerie convenant à ma morphologie était devenu impossible, ce qui a engendré une vraie souffrance. J’ai pris conscience qu’il était compliqué de faire coïncider le besoin des personnes européennes avec des références normalisées asiatiques. En parallèle, étant quelqu’un de manuel, j’ai depuis toujours cette appétence pour la confection et la réalisation. Le besoin identifié combiné à mes envies professionnelles m’ont donné l’idée de me lancer ! Je voulais créer un projet en accord avec mes valeurs n’allant pas à l’encontre de la survie de l’espèce humaine. Il ne faut pas oublier que l’industrie du textile est le deuxième plus gros pollueur mondial… Un fait peu étonnant quand on sait que certaines enseignes proposent 24 collections par an et que pour confectionner un jean, il faut entre 7 000 et 10 000 litres d’eau… Je souhaitais contribuer dans le bon sens, c’est pour cette raison que j’ai décidé d’ouvrir une recyclerie de textile.
Comment cela fonctionne ?
A. L.
Je récupère essentiellement des vêtements en coton de type jersey ou éponge. Ces textiles me permettent de proposer des créations sur-mesure avec des matières réemployées à des tarifs moins élevés que ceux du neuf. Mes vêtements sont soit 100 % à base de tissus issus de la recyclerie, soit un mix de tissus neufs et de tissus recyclés. L’objectif est de revenir à l’essentiel et au durable. Une nécessité selon moi quand on sait que l’on produit aujourd’hui neuf fois et demi trop de vêtements. Avec Jag l’idée est de consommer la mode autrement.
Avec cette méthode de conception, sous combien de temps vos clients reçoivent leur produit ?
A. L.
Il faut compter quatre à six semaines pour être livré car je fais tout moi-même, la phase de coupe, le point de bâti, la finition, l’envoi, etc. Dans certains cas, j’envoie même des échantillons pour que les clients puissent se rendre compte de la brillance ou de la souplesse d’un tissu. Mais ça vaut le coup d’attendre, à l’arrivée vous recevez un produit sur lequel vous avez été acteur.trice, parfaitement ajusté à votre taille à un tarif correct. Pour un sweat par exemple, il faut seulement compter cinq à six euros de plus par rapport à une marque conventionnelle.
Quels sont les retours de vos clients ?
A. L.
« C’est trop classe de pouvoir consommer autrement ! » Ou encore « Suite à mes grossesses, ça faisait 15 ans que je n’arrivais plus à m’habiller, merci pour cette confection sur-mesure même à distance ! »
Quel bénéfice tirez-vous d’être inscrite dans une démarche durable ?
A. L.
D’avoir la réponse à la question : qu’est ce que je pourrais faire pour changer les choses et les améliorer d’ici demain ?
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite se lancer dans une activité orientée développement durable ?
A. L.
De bien étudier de qui il dépend et se poser la question de tout ce qui est en amont. Est ce que l’on veut cautionner une production impropre ou agir en vue d’un futur meilleur ? Un artisan doit se demander si les fournisseurs dont il dépend sont propres ou achètent leur droit à polluer. S’affranchir de ce type de dépendance m’est permis grâce la recyclerie. Les alternatives sont accessibles, il suffit de ne pas fermer les yeux et de se renseigner !