Derrière chaque vocation, il y a très souvent une histoire qui plonge dans l’enfance … Comme celle de David Caron, qui avait choisi de rompre avec la tradition familiale pour y revenir en passant une VAE BP boucher en 2023. A 50 ans, celui-ci s’épanouit désormais au CFA de l’antenne CMA d’Arras en qualité d’enseignant en boucherie charcuterie.
Quand il était petit, David Caron accompagnait son père, -boucher charcutier et naisseur* à Auxi-le-Château-, dans les fermes pour y choisir les bêtes. « On avait le respect de l’animal », assure-t-il. Le jeune garçon adorait cet univers, pourtant il ne se rêvait pas boucher. « Sans doute par esprit de contradiction, reconnait aujourd’hui David. Je n’étais pas toujours d’accord avec mon père, comme souvent à cet âge… A 16 ans, je suis parti en CAP cuisine à Amiens, j’ai travaillé dans la restauration puis je me suis engagé dans l’armée comme VSL. J’ai fini par retourner dans le civil en travaillant à nouveau dans la restauration, à Paris dans les beaux quartiers ensuite au Westminster au Touquet. Puis je me suis lassé … » A 25 ans, David Caron réalise que l’univers de la boucherie lui manque et décide de revenir travailler avec ses parents à Auxi-le-Château. Il sillonne les villages alentours au volant du camion boutique et propose ainsi la viande et la charcuterie traiteur du magasin familial. Sans regrets de sa vie d’avant, au contraire.
La CMA HDF lui propose un poste
Les années passent. Lorsque son père décède en 2013, David décide de passer son CAP boucherie afin de reprendre l’entreprise familiale. Il obtient son diplôme mais les banques ne le suivent pas dans son projet et la mort dans l’âme, celui-ci doit renoncer. La boucherie est vendue. « Ca a été dur très longtemps de ne pas avoir pu reprendre, notamment lorsque j’ai dû me résoudre à aller travailler au rayon boucherie dans la grande distribution », lâche ce grand gaillard. Heureusement pendant ces huit années, David découvre la formation et y prend goût. Il répond ainsi à l’annonce d’une usine alimentaire qui cherche un formateur en découpe de viande. « J’ai fait ça durant un an et demi, pendant mon jour de repos, ça me plaisait, j’avais même envie de passer un diplôme de formateur mais la pandémie a tout bouleversé… »
Finalement David démissionne de la grande distribution et trouve des emplois d’intérim pendant environ neuf mois. Il songe de plus en plus à préparer une formation qualifiante de Formateur Professionnel Adulte. En 2020, il se lance à Amiens. Après deux stages à la CMA d’Arras la même année et l’obtention de son diplôme, à sa surprise, l’établissement lui propose un poste de formateur en boucherie charcuterie traiteur en 2021. « Pour enrichir mon parcours, j’ai décidé de passer une VAE BP boucher, que j’ai obtenue en décembre 2023 à la CMA de Lille. »
« C’est la transmission du savoir-faire qui m’anime…»
Aujourd’hui au CFA d’Arras, David enseigne des formations relevant du Programme Régional de Formation (PRF) en boucherie et charcuterie-traiteur auprès de 80 élèves en CAP/BP boucherie et 40 en CAP/BP charcuterie. Il se félicite aussi de voir ce métier attirer de nouveaux publics et se féminiser davantage. Dans le laboratoire à la température très contrôlée ( et donc bien fraîche), les apprentis à la fois calmes et concentrés, équipés d’un tablier en cotte de maille sous leur tablier, de chaussures de sécurité et de gants, découpent, désossent de gros quartiers de viande, sous l’œil averti de David. Il le sait déjà, certains, plus habiles que d’autres, n’auront aucune difficulté à briller dans la profession. « On les repère facilement, confie-t-il. Connaître le métier de boucher, l’avoir pratiqué , c’est ce qui fait notre force et notre valeur ! Et pour la partie traiteur, mon parcours de cuisinier me sert beaucoup. »
Pour autant, David reconnaît s’être longtemps senti illégitime dans la peau d’un formateur, sans doute pour avoir emprunté des « chemins de traverse. « Au fil du temps ça s’estompe mais j’ai ressenti longtemps le syndrome de l’imposteur, malgré le diplôme, l’expérience terrain … Je réalise que je me sens plus utile à transmettre qu’en vendant de la viande. C’est la transmission du savoir-faire qui m’anime.» Lorsqu’on lui demande s’il songe parfois à ce que penserait son père s’il le voyait aujourd’hui, David Caron hésite un peu puis sourit : « je ne sais pas, j’ai envie de croire qu’il serait content… vous savez, il n’y a pas un jour sans que je ne passe devant la boucherie familiale … »
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*éleveur qui se consacre à la production et à l’élevage d’animaux dès leur naissance.